La journée commence au collège Georges Clemenceau, le film aussi. Il s'achèvera à la fin de l'année scolaire, temps pendant lequel Hélène Milano va accompagner des élèves de 3ème, année décisive, puisque la fin du collège, c'est, déjà, faire le choix d'une orientation, d'un avenir.
Les films en milieu scolaire sont presque devenus une tradition française, mais dans ce genre balisé, Hélène Milano trouve sa voie, son originalité. Entre autres, parce qu'elle évite tout systématisme formel. Du côté des élèves, elle alterne entretiens posés, caméra immergée et captations bienveillantes, avec parfois des bulles de respiration bienvenues (un superbe moment de danse entre deux garçons par exemple). Mais, elle ne met pas moins en lumière les autres interlocuteurs, enseignants, encadrants, qui se démènent pour tenter de faire exister les valeurs de l'éducation telles qu'elles devraient être célébrées, car, eux, semblent encore y croire. Pourtant, l'avenir de ces adolescents, tous issus d'un quartier très défavorisé, paraît en partie joué d'avance. Dans ce moment charnière de leur vie, ce que l'on entend, à travers leurs mots, ce sont espoirs déçus et rêves brisés. Mais jamais le film ne se résigne : avec finesse et obstination, Hélène Milano ne baisse pas les bras, provoquant ainsi des moments inoubliables dans lesquels son écoute attentive nous permet d'accéder à une parole, lucidement implacable et d'une grande intelligence, qui parvient rarement à nos oreilles. « C'est comme s'ils nous avaient éteints. C'est comme s'il avaient éteint notre imagination avec ce système » dit l'un des protagonistes, une telle véracité aurait-elle pu être captée par une fiction ? Pas sûr. Et si cette parole s'exprime depuis le collège, elle reflète également tout un contexte social qui dépasse largement le cadre de l'établissement scolaire ; c'est aussi pour cela que Château rouge est indispensable. »