Rien de plus enthousiasmant qu'un film que l'on découvre, vierge, et qui vous étonne, vous intrigue, vous fait sourire, vous fait travailler avec lui : et puis vous prend, vous guide vers le sens.

_ Qu'est ce qui va arriver à ce groupe d'adolescents en balade sur les plages du Mont Saint-Michel ? On attend et on les regarde dans cet espace quasi surréaliste : ce lieu devient leur état, no man's land avant la grande transformation, le saut dans l'âge adulte. Et eux sont là, ils ont le temps, tout ce temps qu'on peut perdre à l'adolescence, ils parlent, de rien, du trivial, de la bouffe, ils découvrent benoîtement l'ivresse de la Marie Brizard, ils parlent aussi des « grandes choses », des « grandes angoisses » : l'avenir, les choix, la mort ; leurs gestes disent les peurs de l'amour… et soudain deux vieilles femmes passent, elles disent que ça va vite, très vite…

Et voilà, le cinéma est là, évident, le lieu, les êtres filmés, leurs corps, leurs regards, tout devient métaphore, mine de rien. Un regard de cinéaste est né qui a tout transfiguré. Et on est tout simplement heureux de cette révélation.