La Blessure

Un film de Nicolas Klotz

La Blessure

Un film de Nicolas Klotz

France, Belgique - 2003 - 160 min

Blandine est blessée sur le tarmac de Roissy lors d'un retour à l'avion où un groupe d'Africains résiste à l'embarquement. Bien qu'elle soit sur le sol français, sa blessure, sa présence, son être sont niés par la Police Aux Frontières à qui elle demande l'asile. La France est sourde. La France n'est plus une terre d'accueil. Mais une terre butée qui expulse, blesse, et humilie. Réfugiée dans un squat aux fenêtres murées, auprès de son mari Papi qui la soigne, Moktar qui a peur de sortir dans la rue, Steve qui ne se fait plus d'illusions, Fanny et Kary qui vendent leurs corps pour pouvoir dormir sous un toit, Blandine plonge dans le silence...

Avec :
Noëlla Mossaba , Adama Doumbia , Matty Djambo , Ousman Diallo et Mamoudou Koundio

Sorti le 06 avril 2005

Sortie non communiquée

À propos de La Blessure

La colère du réalisateur aurait pu déboucher sur un film manichéen de dénonciation. Mais Nicolas Klotz fait un choix beaucoup plus intelligent et courageux : après une longue préparation-enquête sur le sujet avec sa scénariste Elisabeth Perceval, il propose au spectateur de partager ce que vivent ces exclus au quotidien. Dans la première heure du film, située dans l'aéroport de Roissy, Klotz filme avec rigueur, met en scène avec pudeur et délicatesse la brutalité (curieusement, bien que les personnages soient africains, j'ai souvent pensé au cinéaste chinois Hou Hsiao Hsien), avec un refus constant de tout artifice (au montage comme au tournage), un renoncement à toute virtuosité (ce qui aurait été une façon de récupérer le spectacle du malheur des autres dans un exercice de style destiné à se mettre en valeur).


Le film refuse tout compromis et « élève » le regard du spectateur, l'invite à passer de la simple identification aux personnages découlant d'un sentiment de révolte (face à l'inhumanité de pratiques en cours) à une prise de conscience plus profonde, nous menant à une seconde partie localisée dans les squats. Par son rythme épousant le vécu de ses personnages, avec une caméra qui parvient toujours à trouver la bonne distance, le film nous fait alors partager la vie d'attente, d'ennui et de misère de ces « étrangers ». En nous faisant ressentir la souffrance morale et la détresse de ces exclus, Klotz nous fait comprendre comment cette « blessure » (à la jambe, puis dans tout son être) conduit progressivement Blandine à un exil intérieur et une perte d'identité. En nous rendant de plus en plus familiers ses personnages, le film dépasse le simple sentiment d'empathie et nous fait aimer ces exclus qui cessent peu à peu d'être des « étrangers ».


Ce qui me touche profondément dans ce film est cette façon pour moi inédite de faire naître un poème d'amour, à la fois pudique et poignant, au rythme étrangement contemplatif, à partir d'une prise de conscience purement politique. Un film nécessaire, généreux et sincère, formellement audacieux et d'une grande exigence, qui invite le spectateur à remettre en question sa vision du monde, et apporte un message d'espoir à travers ce sourire final tant attendu de Blandine, qui est l'amorce de sa reconstruction.

Alain Mazars

 - 

Cinéaste


Paroles de cinéastes

Recherche

Gestion des cookies

En poursuivant sur ce site vous acceptez l’utilisation de cookies, qui servent à vous proposer une meilleure expérience de navigation (vidéos, photos, cartes interactives).

Tout refuser