ILS ONT TROUVÉ GODOT !

_ «On m'a informé du travail que vous avez fait avec ma pièce En attendant Godot. S'il vous plait venez à Paris mercredi prochain. Rencontrez-moi au petit café du boulevard Saint Jacques à 11h du matin. Bien à vous…Samuel Beckett. »

_ Jan Johnson vient de mettre en scène cinq détenus dans la pièce de Beckett au sein d'une prison de haute sécurité de Kumla (Suède).

_ « Qu'est-il arrivé à ma pièce quand vous l'avez donnée à ceux qui vivent dans le noir ? »

Lorsque les deux hommes se rencontrent, ils ne savent pas encore que l'écriture de l'un et l'énergie de l'autre vont permettre à des hommes de rencontrer ce que Vladimir et Estragon n'ont eu de cesse de chercher.

Vladimir : « Alors, on y va ? » Estragon : « Allons-y ! ». Ils ne bougent pas….

_ Michka Saäl construit son film comme un puzzle. Le montage des images et des sons nous entraîne entre présent et passé, fiction et réalité, documentaire et théâtre, absurde et vérité, cris et chuchotements… C'est là la grande réussite d'un film qui ne cesse d'interroger le spectateur. Des interrogations sur la faute et la rédemption, sur un système carcéral et une déshumanisation qu'il provoque alors qu'il est censé la réhabiliter.

_ « On ne s'est pas évadé, on est sorti » confie l'un des détenus. « Par la porte de secours du théâtre », complète un autre.

_ Des chansons de Bob Dylan ponctuent une histoire dont personne ne sortira indemne, à commencer par Samuel Beckett lui-même. Qui s'évade et qui s'enferme dans cette histoire ? Prisonniers ? Acteurs ? Spectateur ? Metteur en scène ? Directeur de prison ? Au final, Samuel Beckett dira que « c'est la meilleure chose qui soit arrivé à sa pièce ». Avec Prisonniers de Beckett, une cinéaste nous invite à un grand plongeon poétique entre tragique et burlesque d'une humanité qui attend, se cherche et se trouve.