Le vent du désert balaye sable et poussière sur un village. Derrière une multitude de monticules des êtres grisâtres sortent de terre, soulèvent de petits sacs puis s'éloignent lentement, se fondent dans l'espace où se déploient toutes les nuances de l'ocre. Par ces premiers plans larges et fixes, le ton et le temps sont donnés avant que ne s'ouvre le récit. Un premier visage se découvre : Mocktar, visage clair et serein, se présente devant un officier ; paysan nigérien émigré, il vient se faire embaucher dans la mine d'or, principal décor d'un drame latent. La vie des orpailleurs, en quête d'autres destins, est mise en jeu à chaque descente au fond des trous. Mais Laurent Salgues n'a pas choisi de nous laisser face à l'horreur quotidienne vécue par ces hommes et femmes. Le récit comme l'image gomment tout misérabilisme pour s'approcher du conte. Un conte ancré dans une société avec ses places, sa hiérarchie, ses règles. Avec aussi, pour l'immigré Mocktar, la rencontre de l'autre dans un lieu de survie. Par son travail esthétique, les regards et les gestes rituels des femmes, le bruit des pilons qui rythment le quotidien, le réalisateur nous oblige à côtoyer l'âpre du réel et l'onirique, la beauté et la mort, avec dans chaque plan le temps pour créer nos images, travailler notre propre scénario. Les choix du cinéaste sont une invitation à nous interroger au-delà de la mine et de ces chercheurs d'or du Burkina Faso. Il y a là comme une allégorie sur une Afrique à la fois convoitée par nos regards, et totalement abandonnée.