Pascal
Privet
Programmateur
Bien sûr, il y a Indianara, figure flamboyante en tête des manifs, la poitrine dénudée et scandant les droits de chacun à disposer de son corps, dénonçant les meurtres et les viols laissés impunis, appelant à une révolution qui serait emmenée par les travailleurs du sexe et la communauté LGBTI+. Une lutte menée depuis des années par Indianara et qui devient aujourd'hui une confrontation brutale avec la régression qu'impose un pouvoir totalitaire.
Il y a cette bande de personnes transgenres accueillies par Indianara dans une maison sans confort, un abri foutraque et cependant salutaire pour celles et ceux qui sortent de la précarité et échappent ainsi à la violence de la rue. La promiscuité ne laisse que peu d'espace à chacune, les corps se dénudent sans pudeur pour danser, se baigner ou faire la cuisine. Ils affichent avec aisance leurs singularités, ne cachent pas les marques qu'une vie dure a parfois imprimée dans les chairs. La caméra saisit les rires comme les disputes, les discussions inquiètes comme la détermination avec laquelle cette communauté affronte les vicissitudes et la répression.
Indianara veille sur son petit monde, en organise la bonne marche, joue autant de son autorité que de son humour pour y insuffler une joyeuse énergie. C'est alors qu'Indianara est vraiment belle, dans sa fragilité même. En la filmant dans la plus grande proximité, sans retenue et pourtant avec délicatesse, les cinéastes nous obligent à regarder une personne débordant de fraternité aux côtés de celles et ceux qui lui ressemblent, des êtres différents, ses enfants qu'elle protège de l'iniquité d'une société qui va jusqu'à les assassiner. Indianara ne se laisse pas intimider, elle ne renonce pas, elle dénonce, elle provoque, elle est vivante et ce film nous la rend proche.
Pascal Privet
-Programmateur
Publié le mercredi 30 octobre 2019