Massaker est un film âpre et radical, un film sans visage. Des hommes, soldats-bourreaux lors du massacre de Sabrah et Chatila, parlent dans l'ombre pour rester en vie. Mais leurs corps, leurs peaux et leurs muscles sont là, aussi vivants que le furent un jour leurs victimes. Ils racontent l'ordre ultime qu'ils reçurent et qu'ils exécutèrent froidement : tuez-les tous ! Leur parole se veut objective, descriptive, matérialiste pour tenir le remord à distance. Et pourtant l'absence de jugement les torture. Cette parole est celle de tous les bourreaux, antiques et modernes. La guerre, c'est de toute éternité : « un morceau de fer dans un morceau de chair ». Ces mots sont terribles et précieux à la fois parce qu'ils évoquent des images bien plus atroces que toutes les images banalisées et laissent entrevoir l'effrayante banalité du mal.
Publié le vendredi 15 septembre 2017