Ça dure au cinéma. Ça c’est dar.


Cinéastes de l'ACID

C'est un espace limpide de steppes, un labyrinthe de forêts, de corps très vieux aussi, comme fixés dans une expression sans émotion, avec leurs rigoles, que l'on effleure, des corps beaux que l'on dénude ; la photographie déploie ses splendeurs et convie « le désespéré » du peintre Courbet. Nous entendons dans cette beauté les silences ouverts sur des questions difficiles : d'amour, peut-on mourir ou tuer ? ou l'amour dure-t-il ? (Mon amour de David Teboul, en salle le 15 juin 2022, 2h 52min)


Une caméra s'attarde sur des expressions, l'une trahit le désir, l'autre l'impatience et cette grammaire des regards ne semble jamais les faire coïncider, l'un déroutant l'autre. Encore enfantin, un visage dit l'ardeur, et le caprice, le garçon est vierge, il aspire à sa première fois, connard qui désire cette fille secrète et séduite, qui l'excuse. Baisons ce soir. Les mots et les gestes compliquent les réponses. Elle part. (Qui à part nous de Jonás Trueba, en salle le 20 avril 2022, 3h 40min)


Laisserez-vous le film vibrer là, juste au point de cette énigme épuisante, de la jeunesse ou de la vieillesse qui mesure son désir, son amour, et raconte autre chose ? Il annonce peut-être comme on dit d'une Annonciation, la possibilité, ou la lutte, de toute une vie.


On a gagné OKLM. Mon amour de David Teboul ou Qui à part nous de Jonás Trueba est, a été, sera, sur vos écrans, si vous y prenez garde. Il aura fallu, pour cette victoire (d'étape), la détermination de leurs réalisateurs, la passion transformée en travail bien fait de leurs producteur.trices, distributeur.trices, et toute la filière du cinéma indépendant avec ses exploitants et ses spectateur.trices, qui se savent un peu magicien.nes : la salle, noire, est un accélérateur de particules-vie !


C'était dur ; quand même. Car, combien d'heures consentons-nous à une série en renâclant pour un film en salle ? Trois heures. Trois heures trente. Osez-vous ? Oserez-vous ? Allez, on s'enjaille, courage, sinon on ne sera jamais à l'heure. Le film qui dure fait autre chose que la série. La raison en est simple, l'un finit et l'autre continue. Le film sait sa fin proche et il la repousse. Le film ouvre alors un temps à la démesure. Il déchaine des espaces disproportionnés.


Qui n'a pas compris que la réalité est dernièrement une entreprise d'asphyxie ? L'action et le cinéma - « un monde d'images impalpables et pourtant dures comme l'acier » - peuvent au contraire réclamer toujours plus CONTRE les gens qui attendent, AVEC les gens qui affrontent et qui s'aiment. Et pour eux, pour vous, le temps n'est pas long


Scénario revu et corrigé : [extérieur nuit] - On se fait ce ciné ? - Déter ! - Le film est long. - Balec, ça passera crème.

Cinéastes de l'ACID


Publié le jeudi 28 juillet 2022

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