Un premier film littéralement impressionnant, abouti dans toutes les parties de son projet est si rarement confirmé dans son excellence par les films suivants que l'on finit par devenir méfiant. Avec celui-là..., on doit, on peut, il faut croire en Anne Villacèque.
_ Petite chérie est un film tragique sans pathos ni accent plaintif. Il est incarné dans un rendu cinématographique qui ne trompe pas : une maîtrise où le gros trait n'exclut jamais le souci du détail voilà qui se fait rare.
D'autant que le film ne tombe ni dans l'abstraction (le grand trait) ni dans la mesquinerie (le détail). On est emporté ici sans aucune défaillance jusqu'au terme d'une histoire qui perdait beaucoup à être raconté avec des mots tant le prestige du cinéma la magnifie. Tout est exact : duré des plans, cadrages, fixité ou mouvements, tout est rigoureux ; impérieux et précis comme une phrase de Flaubert. On sait que l'histoire n'est rien si le film n'est pas. Là, le film est tout et c'est un tout compact, un bloc de mystère dans une clarté aveuglante. Une jeune femme - l'héroïne- qui porte déjà le deuil de son existence va voir sa vie transfigurée pour le meilleur et pour le pire.
_ La force de ce film est là, comme un atome en fusion : et s'il fallait oser le pire pour goûter le meilleur ? Un corps déjà éteint va renaître sous nos yeux et c'est fascinant ! Parce que le corps est peut-être plus complexe que l'esprit. Le désir et le plaisir enfin découverts peuvent éveiller l'esprit le plus lourd. Chaque être porte en soi une force pour laquelle il est prêt à mourir.
_ L'héroïne de ce film inoubliable et bouleversant ira jusqu'au bout de son projet pénétrant un enfer réel à un paradis de pacotille.
_ Voilà sa grandeur.
Publié le mercredi 13 septembre 2017