Dominique Boccarossa continue ici son travail singulier, rare, entrepris dans ses différents films courts et Stabat Mater, long métrage inédit à ce jour. Dans Bleu le ciel il traite d'un sujet contemporain : l'exil, l'immigration, le travail au noir. Le cinéaste ne démontre pas, il dépeint. Il met en lumière la solitude des êtres, le silence des visages, la violence d'une société, la misère sexuelle, l'incommunication, l'argent, l'amour aussi. Et pour cela il filme l'humain, le visage humain. L'univers matériel est stylisé, présent par touche. Il n'y a que très peu d'objets, la dramaturgie est ramenée à l'essentiel. Il filme utile, pour montrer l'action il montre les gestes de l'action, la signifiance des gestes. Boccarossa croit à l'art, il croit que l'image est productrice de sens. Il croit à la représentation, à la transfiguration des êtres par le cinéma. Il choisit l'épure, la monochromie des fonds, l'aplat des paysages des peintres du quattrocento. Seul le temps est concret , le temps de l'apparition d'une automobile au loin, celui de la matérialisation du souvenir, le temps suspendu d'un geste, d'un regard, d'une rencontre. Ces hommes venus d'ailleurs, vulnérables, ont gardé la lenteur de leurs origines celle des cultures de la contemplation.
_ Dominique Boccarossa, petit-fils d'immigré italien fait le choix éthique de la contemplation, il voit s'effilocher le travail, l'empathie, il voit des hommes qui cherchent leur place. Cette position n'est pas facile à tenir aujourd'hui dans le cinéma. Qui croit encore que le cinéma est capable de grâce et de transfiguration ?
_ En voyant Bleu le ciel on sait que Boccarossa y croit et nous avec.
Publié le vendredi 15 septembre 2017