Il faudrait, ici, presque ne rien dire sur Micheline tant ce film incroyable, généreux et vagabond devrait être découvert sans rumeur, sans commentaire préalable. Rien dire non par souci de garder le secret sur l'histoire - située là-bas derrière les fourrés, dans l'arrière-plan du décor, à sa place en somme ; comme une tentative réussie d'échapper au formatage neuneu du genre : “ça raconte l'histoire de... ça parle de... C'est sur... " - mais plutôt parce que le mouvement même du film, son souffle, est à l'inverse d'un voyage organisé, et qu'en le balisant inutilement se serait en réduire l'expérience. Il faudrait seulement dire, en mariant une déconcertante simplicité à une évidente conviction, sur un ton enthousiaste mais ferme, tout en travaillant un regard tenace - comme on parlerait à un ami un peu fatigué par le cinéma : il faut que tu le vois, vraiment ! Je t'assure... Tu serais bien bête de le louper... Et si cela ne suffisait pas - il y a des chances, l'ami en question se méfiant toujours un peu - alors... : le flux burlesque de la mise en scène. Cette impression d'apesanteur qui pour un temps vous met en lévitation. Cette contagieuse gaieté dans la flânerie, la paresse. Ces petits bouts de conversations agencées comme une longue chanson mélancolique. Et ce vent qui souffle parfois chaud, parfois froid, fort ou doux, qui ébouriffe vos cheveux et va continuant sa route sur d'autres têtes, caressant d'autres nuques ou épaules, passant par le soufflet d'un accordéon, et finissant dans les allées de cimetières ou bien se métamorphosant dans les jets de vapeur d'un percolateur de l'enfance.
Publié le vendredi 15 septembre 2017