Putty Hill est un film dont le principal mérite est de démentir l'impression de déjà vu de son sujet. De quoi s'agit-il ? D'une réunion de famille qui se prépare à enterrer l'un des siens. D'une évocation de la middle class américaine. Mais Putty Hill ne se réduit pas à cela. Sa puissance d'évocation, sa poignante mélancolie (qui rappelle les nouvelles de Raymond Carver), l'originalité sidérante de certaines scènes (l'enterrement karaoké), la rigueur de son cadrage (qui rappelle les photos de Larry Clark et de Stephen Shore), son rythme sans complaisance, son absence de pathos, de misérabilisme, son élégance presque tchekhovienne, concourent à envoûter durablement son spectateur. Si le sujet semble renvoyer au cinéma de Gus Van Sant, son esthétique, elle, appartient pleinement à son auteur. La réussite de Putty Hill tient aussi à son refus de tout exotisme. On pourrait, en effet, se sentir loin de ces américains moyens aux mœurs rustres, caricaturales, mille fois ressassées. Pourtant il n'en est rien. Au-delà de nos différences culturelles, le spectateur européen finit par éprouver de l'empathie pour ces personnages. La force de Putty Hill, plus que de traiter son sujet, plus que de montrer la difficulté d'entamer un travail de deuil, est de suggérer, de donner à voir le territoire du non-dit.
Publié le lundi 18 septembre 2017