J'ai toujours trouvé que l'essence du cinéma - son bouleversement le plus profond - résidait dans cette faculté troublante à ressusciter les morts, à battre en brèche l'inexorable avancée de la mort : Vertigo, Allemagne année zéro, Pierrot le fou, Mouchette, etc... J'en sors chaque fois brassé et gorgé d'un désir absolu de vivre. Haut les cœurs ! est de ces films menant ce combat surhumain et inégal : un film comme un cri de vie, un hurlement, un éclat de rire formidable jeté à la face de la mort. Et cette guerre, terrible, se joue dans le corps d'une femme qui va enfanter la vie... incarnée par l'immense comédienne qu'est Karin Viard qui (jamais sans doute depuis Emmène-moi) n'a été aussi belle et poignante dans sa maturité. Ce qui est superbe c'est que Solveig Anspach a filmé cette histoire avec un tact, une retenue, une distance qui est la marque des plus grands : l'absolue simplicité des cadres, le velouté de la lumière, la limpidité de la mise en scène, sa sensualité, cet art de suggérer sans jamais rien expliquer, tout chez elle refuse le pathos et capte la violence de cette bataille avec une douceur, un humour, un amour des êtres et de la vie qui vous laisse pantelant. Un film tendre et cruel, déchirant et drôle, solide et insolite, tragique et fou d'espoir, où l'on rit et l'on pleure, beau comme tout : beau comme la vie.
Publié le lundi 18 septembre 2017