Plaidoyer pour la diversité


Cinéastes de l'ACID

Dans la longue liste des chantiers qui se trouvent devant nous pour continuer de faire vivre généreusement et joyeusement le cinéma que nous aimons, il en est un, trop souvent ajourné au nom de l'urgence de la situation actuelle : celui du sens des mots que nous utilisons pour caractériser notre travail, en vue d'agir, entre autres, sur les institutions.

Parmi les mots dont nous devrions ré-interroger la signification, il en est un qui se détache : « diversité ». Plus que d'autres, celui-ci pose problème. Il peut renvoyer à des trajectoires personnelles vécues parfois jusque dans la chair ; mais il est aussi un terme de politique publique devenu tellement générique qu'il en aurait été dévitalisé. Quoi de commun, en effet, entre le « Fonds images de la diversité » du CNC visant à « donner une représentation plus fidèle de la réalité française et de ses composantes et à écrire une histoire commune de l'ensemble de la population française autour des valeurs de la République » et la « clause de diversité » imposée à Canal + lui enjoignant d'acquérir des films dont le budget est inférieur à 4 millions d'euros ?


Sans vouloir jeter aux orties les intentions premières de certains de ces mécanismes, on peut se demander dans quelle mesure ceux-ci, dans le champ du cinéma, atteignent ou non encore leur but qui doit être de faire accéder à la représentation celles/ceux/ce qui, sinon, demeure(nt) invisible(s), dans l'ombre des angles morts. Certes, l'appréciation du « divers » ne peut être que complexe et insatisfaisante dès lors qu'il s'agit de la fixer sous la forme de critères. Pour autant, lorsque le coût médian des films en 2021 est de 2,56 millions d'euros, un seuil définissant la diversité à 4 millions d'euros sonne comme une triste plaisanterie.


Diversitas, en latin, c'est la « divergence », la « contradiction », avant que d'être la simple « différence ». Le « divers », c'est donc ce qui est dans un rapport de tension avec un ordre des choses majoritaire, sinon dominant. Plaider pour la diversité au cinéma, c'est activement et résolument « aller voir ailleurs si nous y sommes ». C'est remettre régulièrement sur le métier notre capacité à rester attentifs à l'Autre, et surtout, avec soin, lui faire la place à laquelle il a droit. Tel est le regard que nous tâchons de porter, à l'ACID, collectif divers, sur les films et leur devenir en salles.

Cinéastes de l'ACID


Publié le vendredi 03 mars 2023

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