« J'ignore l'impossible, je ne préfère rien à l'éternité, mon pays est ouvert comme le ciel, il embrasse l'ami et efface l'intrus. »
Je suis le peuple, chanson d'Oum Kalthoum
Je suis le peuple, d'Anna Roussillon est un grand film documentaire, de ceux qui nous accompagnent durablement, tant la sensation est forte d'avoir, le temps du film, fait de belles rencontres, inattendues, inoubliables. Il s'appelle Farraj ; avec lui c'est toute une famille que nous découvrons, ses voisins, ses amis. C'est un petit peuple, celui d'un village non loin de Louxor, à 700 km au sud du Caire. Anna Roussillon a rencontré Farraj en 2009 au détour d'un champ, ils sont devenus amis. Elle nous convie à cette amitié qu'elle met en scène avec un immense talent. En 2011 quand la révolution éclate en Egypte, elle décide de filmer loin de la place Tahrir, chez Farraj et les siens. Spectateurs de la chute du régime de Moubarak qu'ils suivent sur un vieux téléviseur, ces villageois sont aussi de vrais révolutionnaires. Anna Roussillon partage avec eux l'enthousiasme de ce vent de liberté, les espoirs de changement, et les doutes… loin de la capitale rien ne semble vraiment bouger. Mis en scène à hauteur d'hommes, le film se construit comme un huis clos à ciel ouvert, dans un village entouré de champs, isolé du tourment qui agite le Caire. Farraj et les siens y expérimentent la démocratie. À leurs côtés, avec lucidité, humour et générosité, la cinéaste nous offre une belle leçon de politique et d'humanité.