C'est le printemps pour la campagne dans le cinéma d'auteur : Fin d'été, La beauté du monde ... Celle de P. Ramos touche au mythe (le paradis perdu... mais retrouvé), aux pulsions souterraines (la mimesis : Antoine ne désire la jeune fille qu'après que Noé se fut intéressé à elle). L'auteur prend pour sujet le temps d'une parenthèse : (il n'y a que du présent dans le cinéma et le film nous laisse entendre que son présent (celui de la passion humaine) c'est qu'une nanoseconde dans le temps cosmique). Cette parenthèse de l'arrivée insolite d'une femme dans un petit village pourrait menacer l'ordre immanent des choses, mais à la différence du héros Pasolinien de Théorème qui haïssait la bourgeoisie, elle ne veut pas détruire la paysannerie. Eminemment Rousseauiste, archaïque et païen, ce film possède une force attractive qui repose sur des fils ténus. Les personnages, (un quasi triangle), évoluent dans un « huis ouvert » qui crée une impression de début du monde. Ils échappent aux attendus vulgaires avec l'intelligence de l'instant : Antoine d'accueillir la fille sans arrières pensées, la fille d'ouvrir une fenêtre et de respirer la campagne avec le génie de la simplicité. Noé (P. Garziano, parfait en sorte de sourcier-loup-garou raffiné) qui refuse l'argent d'Antoine, et qui se bat comme un guerrier d'un temps pré-atomique pour défendre sa liberté d'aimer. La scène où les deux hommes règlent leurs comptes est épique. Ils ne s'affrontent pas, ils se coursent dans une bataille rustique, une sorte de combat sorti d'un temps où les homo habilis défendaient leurs territoires à coups de massue. Elle résume ce film épuré.