La Robe du soir

Un film de Myriam Aziza

La Robe du soir

Un film de Myriam Aziza

France - 2009 - 95 min

Juliette, 12 ans, timide et mal dans sa peau voue un véritable culte à son professeur de français, Madame Solenska. Belle quadragénaire souvent provocante, Madame Solenska aime séduire son jeune auditoire : sa classe est son théâtre et ses élèves, ses meilleurs spectateurs. Persuadée d'être son élève préférée, Juliette imagine une relation privilégiée avec cette femme. Mais un jour, en se rendant en cachette chez Madame Solenska, elle en voit sortir Antoine, un élève de sa classe particulièrement beau. Chaque geste, chaque regard de Madame Solenska vers l'adolescent, chaque parole échangée vient alimenter ses soupçons. L'imagination torturée de Juliette s'emballe : pour elle, Madame Solenska et Antoine sont liés par une secrète relation amoureuse...

Avec :
Lio , Alba Gaïa Bellugi , Sophie Mounicot , Léo Legrand , Barthélémy Guillemard et Bernard Blancan

Sorti le 24 février 2010

Sortie non communiquée

À propos de La Robe du soir

Une histoire simple qui nous montre comment le trouble d'un sentiment rend la vie complexe. Quand la perception (sensualité, idéalisation, interprétation) habille d'illusion l'objet du désir. En premier il y a le corps, celui d'une femme et son aisance, sa propension à séduire ses élèves. Le jeu des corps se joue au jour le jour dans la classe. Les enfants découvrent la perversion fine et plaisante par les apparences. Il y a un protagoniste par qui tout passe, qui n'est pas le professeur, mais est assis aux premières loges parmi les élèves. C'est une fille, comme les autres, apparemment. Elle est secrètement amoureuse de sa professeur de français. Son secret l'isole. Incomprise par les autres et peut-être par elle-même, dépassée par sa douleur qui lui mange l'estomac, elle est repoussée aux marges de sa sphère sociale. Et comme cet amour la plonge dans l'âge adulte, à moins que l'enfant soit un adulte qui s'ignore, elle inaugure le cortège de fétichisme, de frustration, de jalousie, de rancœur, de traîtrise et de mensonge qui va avec. Malgré son apparence de simple récit sur les affres d'une adolescente qui découvre le sentiment amoureux, le film nous questionne sur le comportement inconscient de l'adulte éprouvant lui aussi de troubles sensations. Ce jeu de miroir entre la jeune fille et la femme révèle la confusion des sentiments et la nécessité de l'expérience pour en prendre conscience. Il dit que cette prise de conscience se fait à tout âge. L'intérêt cinématographique se niche dans le glissement d'un film qui semble appartenir à une famille traitant du portrait social et psychologique vers un film plus dérangeant sur les zones troubles de chacun. Il y a une logique en forme de morale dans cette histoire d'amour. Si le manque de maturité empêche de surmonter la passion et si l'expérience ne permet pas de la dissoudre dans le quotidien, alors la fuite est la seule solution pour que le temps transforme les talismans en objets dérisoires. Ce film nous rappelle qu'on a tous une boîte noire dans notre placard.

Joël Brisse

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Cinéaste


Paroles de cinéastes

À propos de La Robe du Soir

C'était en octobre 2009, au festival du film francophone de Namur (Belgique). Chaque festivalier connaît l'angoisse de la programmation : puisqu'on ne peut tout voir, il convient d'arrêter des choix. Oui, mais sur quelles bases ? Peu d'éléments d'appréciation nous sont fournis : un pitch succinct, le nom du réalisateur (réalisatrice), le casting…

Le fait que Lio incarnait un professeur de français du secondaire constituait en soi une curiosité, une sorte de contre-emploi qui m'a d'autant plus intrigué que le titre du film me semblait bizarroïde et que je ne connaissais rien de la réalisatrice dont la présence était au surplus annoncée lors de la projection. Mon planning était établi…Je ne l'ai pas regretté.

Comme nombre de spectateurs, je suis immédiatement entré dans ce film jubilatoire. Quand les lumières de la salle se sont rallumées, la quasi-totalité de l'assistance est restée pour le débat, un débat très vivant, car ce film si fin et si proche de la réalité a rallumé en nous les lampions des souvenirs scolaires et adolescents. Certes, une prof coincée a balayé d'un revers de manche les allégations et arguments du film : « non, cela ne se passe pas comme ça, nous avons une déontologie, etc.…etc.… », mais tous les autres intervenants y sont allés de leur compliment sur la pertinence du propos, et aussi du récit de leur expérience, les langues se sont déliées.

Pour ma part, je suis de la génération qui a connu le succès public du film « MOURIR D'AIMER », avec Annie Girardot, d'après un fait divers tragique, le suicide d'une prof amoureuse d'un de ses élèves, fait divers qui avait à ce point défrayé la chronique que lors d'une pontifiante conférence de presse du président Pompidou, celui-ci, interrogé sur le sujet, s'était fendu d'un commentaire ému en déclamant quelques vers.

Me reviennent aussi des images du film « LES RISQUES DU METIER », avec Jacques Brel et la petite élève « déchirée ».

Plus près de nous, il convient à mon avis d'évoquer le film éblouissant de Gregg Araki intitulé « MYSTERIOUS SKIN », surtout la fascination du premier des enfants pour son beau et charismatique prof de gym et l'appréhension par cet angle inédit du délicat sujet de la pédophilie- côté victime..

Oui, sans aller jusqu'à cette extrémité, la passion et ses désordres peuvent survenir dans une salle de classe. La réalisatrice l'a montré de façon probante. Souvent l'attirance, qu'elle s'exerce dans le sens élève prof ou dans le sens inverse, est frappée de déni, réprimée. Une prof a témoigné de son vécu, à savoir une préférence instinctive pour une élève. En réaction, elle s'est montrée plus sévère avec son chouchou jusqu'au jour où ce dernier est venu lui demander pourquoi elle ne l'aimait pas (un comble !) et pourquoi elle manifestait tant d'injustice à son égard… Une situation paradoxale et cruelle.

Myriam AZIZA n'a pas forcément réalisé un film autobiographique, mais son souci du détail fait mouche. On croirait qu'elle a lu STENDHAL pour la description psychologique, l'analyse des sentiments, l'éveil de la jalousie, les étapes de la passion… ou alors « FRAGMENTS DU DISCOURS AMOUREUX », de Roland BARTHES, et d'autres encore.Voilà pour le scénario. 

Quant à la direction d'acteurs, d'actrices devrais-je dire, elle ne souffre aucune discussion. Au début on peut être surpris par la présence de LIO, et puis on se dit que le choix est idéal, parce que depuis « Banana Split » (-je sais, elle n'aime pas cette référence-), elle a beaucoup fonctionné sur le mode de la séduction, voire de la provocation. Dans le film, on en joue sans en sur jouer.

Quant à la collégienne, elle fait une composition juste, impeccable même. Traduire les émois d'un amour inavouable, les désirs naissants, les doutes et difficultés inhérents à l'âge ingrat (mue du corps, coups de tête, foucades…) , ce n'était pas donné d'avance. Elle l'a fait.

Pour un sujet pas si facile, peu traité au cinéma, la jeune réalisatrice s'en sort avec assez de talent pour qu'on attende impatiemment son deuxième film. J'ai apprécié sa relative modestie et son sens aigu de la progression dramatique. « LA ROBE DU SOIR » est à marquer d'une pierre blanche. Il fait partie des films qui m'ont inondé d'un rare état de grâce. A la fin du débat, nous étions quelques-uns à le penser et à en discuter encore en dehors de la salle (on nous avait priés de partir à cause de la projection suivante).

Bernard Rotteleur

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Spectateur ACID


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