Fainéant·es, rare film au titre inclusif, traite d'un milieu trop peu ou carrément pas représenté : celui des "punks à chien" à coupe iroquoise, des sdf libertaires tatoués et des squats qu'aime déloger la police. Karim Dridi réussit, grâce à une méthodologie qu'il a gardée du documentaire, à nous plonger dans l'univers de Djoul et Nina qui sont 40 ans plus tard les descendantes directes de Mona de Sans toit, ni loi d'Agnès Varda. Elles croisent d'autres marginaux magnifiques intrinsèquement libres, sortis d'un film de Tony Gatlif. L'interprétation générale du film est remarquable. Ce ne sont pas des acteurs, ils ne jouent pas, ils sont. Ce sont des visages et des gestes, une déclinaison de petits échanges humains qui disent le rapport à l'autre, l'attention, la solidarité et finalement l'amour. Visiblement inspiré par leurs vies et leurs caractères, le cinéaste se place à la juste distance, en empathie avec ses personnages. Il parvient à nous confronter à la réalité d'un quotidien autant subi que désiré et nous propose des fragments vécus avec intensité : une fausse couche rarement montrée avec autant de dureté et qui en même temps n'est qu'un aléas de plus dans la vie de l'héroïne, des retrouvailles, le temps d'un deuil avec un père qui finissent par un fou rire, une séparation magnifique en haut des marches de la gare St Charles de Marseille mêlant affection enfantine et pudeur, autant de scènes qui associent situations concrètes et éthique qui nous montrent une communauté généreuse dans laquelle prévaut l'amitié et la loyauté.
Publié le mercredi 03 avril 2024