La moindre des choses


Cinéastes de l'ACID

Il faut parfois revenir à des choses simples, fondamentales. D'abord, le cinéma, ça enregistre : des calèches, charrettes, piétons, qui circulent sur une place ; des barques et des pêcheurs dans la mer ; des trains et des gares, des bateaux et des chantiers ; des ouvriers, des chiffonniers, des bourgeois ; des foules et des regards, des mains et des cris ; du vent et de la neige ; des poursuites et des gags ; des acteurs et des décors ; des formes, des couleurs, du mouvement… C'est de la science, autant que du hasard et de la mise en scène ; c'est la vie qui entre et qui sort du cadre, vibrante, loufoque, cruelle. Et le cinéma, à l'origine avec la même machine que celle qui enregistre, aussi ça projette, et ça projette devant plusieurs. Ça ne suffit pas à faire des spectateurs des citoyens, ni à être politique, mais disons que ça fait quand même un commun partagé.


Autre chose simple : qu'est-ce qui fait qu'un film est intéressant ? D'abord, quand des choses intéressantes sont filmées : cf. la liste ci-dessus, et ad libitum. Et c'est encore plus intéressant quand du temps, de l'espace, du hors-champ, des histoires, une abstraction, un paradoxe, se logent dans et entre les plans, c'est le montage. Donc, le cinéma, disons que ça enregistre, ça monte et ça projette.


Ce sont des choses aussi simples, et fondamentales, que nous sommes nombreuses et nombreux à l'ACID à tenter de transmettre dans nos multiples engagements dans les salles, les écoles, collèges, lycées, universités, prisons, centres de loisirs… Pour beaucoup d'entre nous autant pour gagner une part de notre vie que par fort intérêt pour l'action culturelle, dans la lignée de l'éducation populaire, pour un « élitisme pour tous », une exigence qui est bien la moindre des choses. Pas pour expliquer les films ni les décrypter, mais convaincus que le cinéma – cette technique, ce spectacle populaire, cet artisanat, cette industrie, cet art – ne saurait se résumer à des images ni se confondre avec un média, mais qu'il peut d'abord nous montrer et raconter quelque chose du monde et de soi, quelque chose qui n'avait pas encore été vu ainsi.


Or, c'est la grandeur du cinéma que d'avoir aussi été là pour donner à voir autant son mouvement propre – ça tourne – que le mouvement social, la révolte, la lutte. Pour mémoire : La Grève, Zéro de conduite, les groupes Medvedkine, Ogawa, Une chambre en ville, Bayan ko, Reprise… À l'heure de manifestations historiques, des blocages et occupations, des réquisitions, gardes à vue arbitraires et violences policières, et sans préjuger de ce que ces jours préparent, nous ne pouvons qu'être là, avec ou sans caméra, face et avec ce qui se présente aujourd'hui d'intéressant.

Cinéastes de l'ACID


Publié le mardi 04 avril 2023

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