Autant le dire tout de suite on ne tarira pas d'éloges sur le nouveau film d'Henri François Imbert. Pour commencer, on annoncera, haut et fort, qu'il s'agit d'un grand film à la finesse impressionnante. Un travail d'une incroyable maîtrise, d'une parfaite fluidité. Un film sidérant qui repose en grande partie sur le silence, où tout est subtilement pesé, où rien n'est en trop et rien ne manque. Et en prime le sentiment troublant, persistant, qu'on a déposé aux creux de nos oreilles, à la surface de nos yeux, presque à notre insu, quelque chose qui va imprégner durablement notre esprit. Lentement mais sûrement. Des deux précédents films de Henri François Imbert, on a gardé en mémoire -entre autre- l'image très nette de Jack et de sa famille, à Belfast, en Irlande, et celle de Doulaye et les siens, au Mali, à Bamako. Deux visages singuliers, deux hommes marquants, et le temps d'une plage ou d'une saison de pluie pour révéler le lien qui les unit chacun à leur pays. Avec No pasaran, album souvenir Henri François Imbert opère une discrète rupture dans son travail. Chez un cinéaste peu enclin au spectaculaire, ce changement ne serait être trop évident… Mais tout de même, il est là, bien visible. Ici, il s'agira plus de s'attacher au mouvement de millier d'individus, et on l'aura compris par le titre du film, les républicains espagnols et leur exode en France, qu'à chercher le portrait d'une seule personne. À travers le récit dramatique de ces combattants « en marche vers la liberté », le cinéaste se donne un but à atteindre, il scelle entre eux et le film une mission. Celle de nous faire plonger dans l'Histoire pour mieux appréhender notre époque actuelle. On n'en dira pas plus sur cet instant où le film bascule d'hier à aujourd'hui, et qui compose les dernières séquences. Non par la volonté de créer du mystère, mais soucieux de laisser chacun vierge de toutes idées préconçues. Afin que chacun s'imprègne librement de ce que fut une sombre page de l'Histoire, et de sa force à réapparaître sous nos yeux, dans une accumulation de signes et de détails, qui alimentent, un peu plus et encore, cette inquiétante question qu'un écrivain Japonais donnait comme titre à une de ses nouvelles : « Dites-nous comment survivre à notre folie ? »
Publié le mardi 12 septembre 2017