Invoquer Robert Mitchum, cette icône du cinéma américain, est une prise de risque que les réalisateurs négocient avec une habileté jouissive. La rigueur de la mise en scène, des cadres, d'une lumière belle sans être esthétisante, permet à des acteurs complètement atypiques dans le paysage cinématographique français de déployer subtilement leur talent singulier. On pense à Jarmush, dans sa première période, avec ici de la couleur. Il y a là autant de plaisir à partager que d'intelligence cinématographique. Un plaisir de voir Olivier Gourmet dans un rôle qui lui va comme un gant de cuir, de découvrir Pablo Nicomedes en insomniaque manipulé par le désir fou de son père spirituel, d'écouter l'impeccable Bakary Sangaré en musicien monomaniaque. Un plaisir aussi de traverser ces paysages à la poursuite d'un rêve de cinéma, cette illusion désirable, rendue d'autant plus actuelle et vivante avec les actions bourrées d'imagination de nos héros. Il faut s'engouffrer sans attendre dans ce road-movie aérien, parfois mystique, dans lequel deux précaires s'inventent un futur, et de la sorte se construisent un présent au gré de leurs improbables rencontres. Et lire dans cette fable, contre toute monotonie, une résolution à vivre au cœur de ce qui fait la vie quand elle s'invente.
Publié le mercredi 11 octobre 2017