Tels les personnages hantés du film d'Alain Mazars nous nous laissons aller doucement. Petit à petit, la rumeur de la ville s'efface tandis que les sons et les images prennent possession de nous. Nous abandonnons alors notre fauteuil de velours rouge pour pénétrer dans un autre monde, là où les forêts sont profondes comme l'inconscient. Nous rêvons avec le film. Nous flottons à travers les bois. Une sensualité discrète nous enveloppe tandis que les voix langoureuses de sirènes laotiennes murmurent à nos oreilles l'histoire des esprits anathèmes, les Phipops. Les voix nous entraînent, nous voulons les suivre, là où vivent ces hommes et ces femmes que l'on dit démons. Nous ne savons plus réellement où nous sommes, nous ne savons pas où nous allons, mais nous n'avons pas peur, c'est une agréable perdition. Nous aimons nous sentir basculer, quitter la réalité pour l'illusion, le réel pour la fiction. Puis, nous finissons par admettre que l'illusion est aussi une réalité, nous finissons par croire qu'elle fait partie de ces vies. Nous croyons que des papillons ont cousu les paupières d'une nonne aveugle ou que l'esprit d'un bonze habite le corps d'un jeune voyageur français. Il faut faire l'expérience Phipop, le voir autant que l'entendre, suivre le labyrinthe d'une histoire où les sensations comptent autant que le récit, bref, se laisser posséder par ce film étrange et habité, au risque de devenir des spectateurs Phipops.
Publié le vendredi 15 septembre 2017