Pour moi le plus beau film de Robert Guédiguian. Pourquoi ? Parce que si son cinéma émeut par sa fidélité sans faille à une bande de potes qu'il n'a cessé d'aimer et de filmer depuis dix-sept ans, à un engagement (qui force le respect après cette décennie de grands reniements), à une ville et à son histoire ouvrière (inscrite dans la chair du quartier de son enfance : l'Estaque)... Si, de film en film, Robert raconte la même histoire, celle de la générosité, de la vie et de la communauté des copains, plus forte que la société machine à exclure et déshumaniser... Ce qui touche cette fois, encore plus profondément, c'est ce plaisir de cinéma que Robert libère : plaisir de la mise en scène du fugitif, plaisir de l'émotion en gros-plans sur des visages et en premier, celui de sa femme, Ariane, dans le rôle de Jeannette, plus bouleversante et plus belle qu'elle n'a jamais été. Courrez voir Marius et Jeannette ne serait-ce que pour cet état de grâce, par exemple le plan de Marius venant refaire les peintures de Jeannette et découvrant son désir d'elle : un simple mouvement de caméra glissant depuis ses pieds à elle pour aller vers lui et revenir à elle... Pour cette fragilité-là, cet amour, cette fidélité, cette pudeur-là - d'écorché vif - que Robert ose mettre à nu dans son cinéma, on n'a qu'une envie : dire "merci".
Publié le vendredi 15 septembre 2017