Les Passagers de Jean-Claude Guiguet est pour moi un chant d'amour et de détresse, mais d'une détresse si insolente et pleine d'appétit de vivre qu'elle en devient joyeuse. J'aime beaucoup ce film pour son caractère déroutant, son humour singulier reposant sur un malicieux et savant détournement des clichés. Il y a souvent des moments très drôles (celui où le passager du tramway parle de sexualité à un jeune homme au regard énigmatique) dont l'étrangeté semble résulter de la subtile distanciation que chaque acteur introduit dans son jeu. Un film impressionniste à la structure éclatée et musicale, dont la recherche formelle est toujours guidée par l'émotion, qui ose faire ce que les ouvrages théoriques interdisent, et réussit à emporter l'adhésion du spectateur à force de justesse, d'intelligence et de sincérité. Un film beau et profond sur la vie et la mort nous invitant à la fois à la résistance et au détachement. Il s'agit de redécouvrir des vérités oubliées, de retrouver nos racines, par une rééducation de notre regard perverti.
Publié le vendredi 15 septembre 2017