C'est un documentaire filmé en super 16mm, un documentaire en cinémascope. Un des derniers, et peut-être même le dernier documentaire filmé en « argentique » et en scope. Magique. Une vibration du monde comme on n'en voit plus, comme on n'en verra plus. Un documentaire qui nous plonge dans l'immensité de la nature et dont l'image grâce à la pellicule vit et vibre comme la nature elle même.
Dans cette nature, un homme.
Un homme qui n'est pas à proprement parler un personnage. Un homme au fin fond de l'Argentine qui vit dans une minuscule maison de bois, s'occupe des moutons de l'Estancia ramasse les pièges qu'il a préalablement posés... Parfois il boit le maté avec un de ses voisins, et rend des comptes à sa patronne qui vient de temps en temps le voir. Ce n'est pas un portrait, ce n'est pas non plus le récit d'un autre mode de vie. Ce n'est pas non plus un film sur les paysages. Pourtant il y a un homme et des paysages.
La nature, et l'homme au même niveau. C'est cela qui est remarquable, un film qui ne prend le parti ni de l'un, ni de l'autre, mais qui conjugue l'homme et la nature dans le récit et dans le plan.
La question du rapport de l'homme à la nature n'est pas posée par les mots, par « le sujet » mais par le cinéma, par le cadre lui même. La nature prend une autre dimension quand l'homme entre dans « le champ » et pourtant rien n'a changé. Cet homme là ne fait souvent que traverser le paysage. Mais du simple fait de son apparition, le paysage se structure soudain différemment. Il devient autre chose. Il nous apparaît autrement. C'est cette géométrie variable entre l'homme et la nature, que l'on appréhende dans ce film. Il n'y a pas de mystification. Il y a un refus de tout romantisme et humanisme. C'est une réponse cinématographique à une question écologique.