Une élégie convulsive d'amour et de mort, de vitalité et de deuil ; dès le titre, le film s'affiche paradoxal, tendu vers un défi impossible : arracher à son destin l'ami que la terre a déjà englouti.
L'histoire commence par la fin ; un cimetière, quelques rares visages, une jeune femme, un cercueil. La jeune femme dit adieu au compagnon de sa vie : son copain, son mari, son ex, son complice. Pas de retournement donc, ni de happy end à espérer. No future dans la Russie de Poutine, aka la "Fédération de la Dépression", comme la réalisatrice surnomme son pays.
Mais voilà qu'au sortir du cimetière, la mort est percutée par un flash-back anarchique : dix ans d'images intimes, folles, désespérées, où chaque jour menace d'être le dernier.
En une métaphore fulgurante, qui traverse le film, l'autodestruction de jeunes russes y devient le miroir de l'autodestruction de tout un pays, qui s'enfonce dans un bad trip sans issue. Le dénouement sera tragique, mais le cinéma résiste, refuse de laisser le dernier mot à la fatalité. Marusya Syroechkovskaya filme Kimi, Kimi filme Marusya. Et le montage, guidé par une voix frappante de douceur face à un monde inhabitable, entraîne sans cesse le récit ailleurs. Vers une histoire de tendresse et d'amour. Des éclats de joie y brillent au milieu de la nuit ; la part lumineuse des deux compagnons s'y révèle au bord de l'abîme, comme un baroud d'honneur à la mort, un cri de rage contre le régime…
A convulsive elegy of love and death, of vitality and mourning. Right from its title, How to save a dead friend asserts its paradoxical nature and reveals its impossible challenge : to save a friend who is already buried in the ground from his fatal destiny.
The story starts at the end, with a cemetery, a few faces, a young woman and a coffin. The young woman says farewell to her lifelong companion : her friend, her husband, her ex, her accomplice. There is no final twist or happy ending to hope for. There is literally No Future in Putin's Russia, aka the « Federation of Depression », as the filmmaker nicknamed her own country.
And yet, when it comes out of the cemetery, Death gets hit by an anarchic flash-back : ten years of crazy, desperate and intimate footage in which every day might well have been the last.
Through a dazzling metaphor that runs all along the movie, the self-destruction of Russian youth becomes a mirror for the self-destruction of the whole country, which sinks into a hopeless bad trip. The ending will be a tragic one but cinema opposes a form of resistance to the inevitable and refuses to let fatality win. Marusya Syroechkovskaya films Kimi, Kimi films Marusya. The editing, guided by a voice over which opposes its softness to an unbearable world, constantly pushes the story towards unexpected places. Towards a story of love and tenderness. There are moments of joy which shine bright in the night. And the inner luminous part of these two companions reveals itself when they stand on the edge of the abyss, like a cry of rage against a regime, or a last-ditch struggle to confront death.