Le Pont du trieur / Stanwix

Un film de Charles De Meaux

Le Pont du trieur / Stanwix

Un film de Charles De Meaux

France - 2000 - 74 min

Sur les toits de Khorog, la capitale du Pamir et la partie la plus haute du Tadjikistan, frontalière avec l'Afghanistan et la Chine, les antennes de télévision sont souvent de fortune. L'une d'elle est exemplaire : là, comme un symbole, deux bobines de films 16mm accolées servent à capter les ondes. Conçu comme une émission de radio qui creuse le Pamir comme on évide un tronc pour en faire une barque, Le pont du trieur interroge ce mythique Pamir, "pays dont on n'a pas d'image". Une flânerie imprégnante et poétique, depuis un studio de radio parisien où un botaniste pamiri vient à la barre dire son pays, jusqu'au gardien de l'un des cols les plus hauts du monde, en passant par une rentrée des classes dans un village sans nom, ou un side-car en forme d'arche de Noé. Un voyage entre la subjectivité et l'immensité. Comme des chutes de bobines égarées qui, d'un pays lointain, aggraveraient le mystère.

Avec :
Thibault de Montalembert et Camille Japy

Sorti le 24 mai 2000

Sortie non communiquée

À propos du Pont du trieur & Stanwix

Nous sommes dans un non-lieu, c'est à dire n'importe où, quelque part sur la “petite planète”. Au fin fond de ce plateau de télévision, c'est l'information dont se tient le procès... En l'occurrence l'hypothèse documentaire d'une réalité venue d'ailleurs, du trou-du-cul du monde, d'une contrée indécise lâchée tout autant par le grand frère communiste que par la croissance post-libérale : le Pamir. Oublié de l'histoire, perdu entre Kazakhstan et Nulleparistan, le Pamir émet de ses nouvelles et une équipe improbable tente de les recevoir, voire de les diffuser, si tant est que l'on puisse évoquer une quelconque actualité dans ce pays en attente, sans plus même d'intérêt stratégique ni de ressources minières... Rien, rien qu'une steppe désolée, déchirée des montagnes qui la coupe du monde, un bled un brin absurde dans sa beauté inutile, où seule s'agite encore une vague capitale aux allures se sous-préfecture stalinienne chômeuse. Témoins à l'appui, comme appelés à la barre, les images de là-bas butent sur l'espérance d'un monde extérieur téléspectateur, sur la fonctionnalité high-tech de ce studio de télévision où l'on tentera tout, commentaire précis en voix off, témoin exotique et convaincant, effets de montage, pour réinjecter du réel, à ce pays beckettien qui se complaît à devenir légende aussitôt, où le vrai résiste à devenir un moment du faux. Rien n'y fait, nous ne sommes pas du même monde, la désertification inéluctable du Pamir semble contaminer peu à peu le studio, enfin rendu à sa vacuité centrale, à son crépuscule, à son rêve d'information totale. Reste un film énigmatique, une méditation sur l'objectivité spectaculaire, l'effet de réel et les rites incantatoires du reportage menés avec tendresse par deux réalisateurs venus de l'Art contemporain.

Vincent Dieutre

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