Pursuit of loneliness envisage le monde comme une succession de tableaux lumineux en contrepoint d'une étrange obscurité. Des cadres subtilement dessinés à l'intérieur desquels hommes et femmes laissent des traces fébriles de leur passage. Menant de front deux récits, le film nous raconte de quelle manière, au crépuscule de leur vie, certains d'entre nous disparaissent tout autant pour la collectivité que pour eux-mêmes. Mais c'est aussi l'histoire d'une société qui s'évertue pas à pas à reconstituer l'identité des morts anonymes, d'abord par nécessité morale et légale, ensuite peut-être par compassion. Point de pathos, donc, mais un ensemble d'individus qui enquête minutieusement, recompose l'histoire d'une vie qui s'est éteinte ou plutôt effacée. Et justement, la grande réussite du réalisateur réside dans une mise en scène qui propose aux spectateurs de regarder ce récit comme un secret dont il faudrait témoigner. Par un travail parfois documentaire qui n'abandonne jamais l'exigence d'une esthétique rigoureuse et sophistiquée, ce film façonne notre regard tout autant qu'il questionne notre position face à cette enquête. Émerge alors une subtile mélancolie - parfaitement suggérée par la musique de William Basinski - écho d'une mort annoncée dont quelqu'un (peut-être nous ?) devra bien finir par faire le deuil.
Publié le vendredi 13 octobre 2017