Madame B, Histoire d'une Nord-Coréenne nous happe d'entrée dans un tourbillon, celui de la fuite, du danger, des corps que l'on ne voit pas, des paysages qu'il ne faut pas reconnaître. Lorsque nous reprenons pied, c'est pour nous retrouver échoués sur les terres d'une famille de petits paysans pauvres, avec Madame B et son mari, un Chinois qui l'a achetée.
À l'image de ce début déboussolant, le film ne cessera de mettre à mal nos certitudes, de nous amener là où l'on ne s'y attend pas. C'est dans ce maelström géopolitique entre la Corée du Nord, la Chine et la Corée du Sud, fantasme absolu des frontières infranchissables, de la paranoïa ultime, qu'il nous installe pour nous parler de liens humains, de liberté, d'amour. Que Madame B soit avec sa famille chinoise ou nord-coréenne, les scènes évoquent le même havre d'union, de souci de l'autre.
La beauté du film réside dans cette dialectique construite subtilement, à l'image de son héroïne, entre épopées migratoires et douceur domestique, peuplée d'êtres délicats pour qui la survie passe par la considération de l'autre. Il trace le portrait de cette puissante ouvrière qui dans sa fuite tisse sa toile affective et œuvre pour l'affranchissement de ceux qu'elle aime.
Publié le lundi 11 septembre 2017