L'incroyable M, de Yolande Zauberman, documentaire présenté en compétition internationale, n'a pas rien à voir avec celui de Fritz Lang (1931), puisqu'il en est à la fois le remake objectif et le contraire absolu. Son «M» à lui s'appelle Menahem Lang, ça ne s'invente pas, et ce M-là est la victime, et non le bourreau, comme son autre. Il a pourtant des airs de Peter Lorre, homme marqué. Et il retourne sur les lieux du crime : dans la ville ultraorthodoxe de Bnei Brak, aux portes de Tel-Aviv, où il a grandi et où il a été violé, enfant, par plusieurs hommes, sous couvert d'un silence religieux et complice. Yolande Zauberman filme cet endroit d'accès difficile comme un lieu de pur fantastique, où l'expressionnisme serait dans le réel, dans l'ordre des choses, dans les pieuses silhouettes d'ombres à chapeaux sur les murs, plutôt que dans la forme, simplement belle, du regard porté sur eux.