Tout d'abord la joie. Celle de retrouver depuis peu le chemin des salles de cinéma, d'y sentir vibrer à nouveau la lueur du monde, d'y découvrir des œuvres qui redessinent notre rapport au présent. Et puis il y a la fierté, celle d'un projet collectif, celui de l'ACID, dont la programmation au Festival de Cannes lance pour nous une année qui sera jalonnée de multiples projections, débats, rencontres avec les cinéastes partout en France et à l'étranger. Une programmation d'auteurs soucieux de mettre en partage neuf films singuliers, engagés et engageants, capables de pas de côté salutaires, de briser les codes et les certitudes. Des choix toujours animés par notre foi en un cinéma qui redonne matière à penser et à rêver – nécessaire exigence dans une époque où planent menaces environnementales, populisme et régression de nos libertés. Multiples dangers qui mettent en péril nos sociétés particulièrement fragilisées par la crise sanitaire.
Car oui, il faut bien le dire, jamais il n'aura été autant nécessaire de se rencontrer, d'éprouver la présence d'un voisin ou d'une voisine de fauteuil, de sentir nos regards portés sur l'écran, partageant tous ensemble cette expérience possible qu'est le cinéma – un rapport renouvelé au corps, au temps et à l'espace. Plus que jamais, ce qui nous unit, comme nos différences, doit être mis en scène, révélé et discuté avec force.
Joie et fierté donc mais aussi vigilance car si nous savons ce que le cinéma peut, nous n'avons aucun doute sur ce que certains voudraient qu'il cesse de faire. Résister à l'uniformisation des formes et des pensées, c'est aussi faire honneur à un public dont nous savons l'exigence et le désir d'imaginaire bien vivants, de récits levant le voile sur la vérité du monde, d'œuvres réinterrogeant des manières de faire comme de dire. Et c'est forts des liens qui nous unissent aux cinéastes, producteurs, distributeurs, exploitants jusqu'aux spectateurs, que nous continuerons à creuser ce sillon, à redessiner sans cesse une cartographie singulière des œuvres, à les diffuser partout et pour tous. Et à réaffirmer que c'est parce que nous ne sommes pas nécessaires que nous sommes indispensables.
Cinéaste
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-Membre du Conseil d'Administration
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Publié le lundi 28 juin 2021