D'abord le maquillage, à grands coups de peinture sur les paupières, puis les faux cils longs et noirs, le brushing à la laque – beaucoup de laque et du parfum, partout… La traîne de mariée vient s'accrocher au justaucorps rose à paillettes pour parachever la tenue. En off, les acclamations du public : CASSANDRO !!!
Saúl Armendáriz est ce Cassandro, fameux catcheur mexicain surnommé « l'exotique » comme tous les queer de la Lucha Libre. Le corps noueux, musclé, balafré. Un corps à dompter, poussé toujours plus loin, à l'extrême, jusqu'au point de rupture, pour le spectacle, pour la légende, celle de son personnage, Cassandro l'Exotico. Un double comme un ticket de survie, comme un majestueux pied de nez à une vie qui n'a pas été douce.
Cassandro aura tout traversé, viol, passages à tabac, humiliations, drogues dures, alcool mais subsiste à jamais debout, tel le Phénix, prêt chaque jour à remonter sur le ring avec ses tenues toujours plus folles, à se précipiter dans le vide pour nourrir la légende et épater une foule galvanisée.
Il y a des regards qui nous grandissent. Celui de Marie Losier, aimante infatigable des êtres borderline qui défient la mort est de ceux-là. Depuis ses premiers films, Marie Losier tourne en pellicule. Une pellicule qui se fait chair, acte la vie dans les interstices et les chaos. Ici, se font échos les soubresauts de la vie de Cassandro entre deux combats et ceux occasionnés par la pellicule, lorsque la bobine s'arrête et que le son pétillant prolonge l'instant. On reste alors comme médusé et en suspens, accroché au mirage de la chevelure blonde et de l'énergie sonnante et délirante du super héros acidulé.